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Aménagement du lit de l'HERS (du XVIII° siècle à nos jours)


Pierre FABRE.


Raccourci géographique
.

         La vallée de l'Hers Mort, située au sortir su seuil de Naurouze, a toujours été le lieu de passage privilégié pour accéder du monde méditerranéen au monde aquitain.
         L'Hers Mort1 (ou Petit Hers) prend sa source au sud de Castelnaudary, dans les collines autour de Laurac, un peu à l'Ouest. Après être passé sous le canal du Midi au pied de Renneville, il rejoint la gouttière2 qui va prendre le nom de Vallée de l'Hers jusqu'à ce qu'elle rejoigne la vallée de la Garonne à l'Union. Dès son arrivée dans la gouttière, l'Hers va recevoir tout une série d'affluents descendant des collines qui bordent la gouttière : (parmi les principaux)
- côté Sud : le Gardijol, La Thésauque, les Mals, l'Amadou
- côté Nord, le Marès à la sortie de Villefranche, le Vizenc, le Rivel à Baziège,

         Ces ruisseaux sans grande importance, en temps normal, peuvent lui apporter une grande quantité d'eau, lors de violents orages ou de longues périodes pluvieuses du printemps - surtout ceux du côté Sud étant donné leur pente plus rapide.
- la Marcaissonne et la Saune le rejoignent vers Montaudran et le Girou juste avant le confluent avec la Garonne à Grenade Ce sont des affluents qui gèrent des bassins parallèles à la Vallée de l'Hers et alimentant en eau la basse vallée de l'Hers de Montaudran à Grenade.

         Cette vallée de l'Hers peuplée dès la préhistoire le doit principalement à sa situation géographique, mais aussi à la présence d'une immense forêt qui va fournir aux hommes les matières premières et la nourriture dont ils ont besoin. Au Moyen-Age cette forêt3, va porter le nom de forêt de Baziège et de St Rome.
         Dans cette vallée, la pente est très faible : de l'ordre de un millimètre par mètre. Aussi le lit de l'Hers est méandreux. Par exemple en 1729, l'ingénieur du diocèse Clapiès, chargé d'instruire un rapport sur le cours d'eau notait : " par ses sinuosités et ses contours (cette rivière ) avait plus de dix-huit lieues de long, depuis l'aqueduc de Renneville jusqu'à son embouchure, tandis qu'elle n'en aurait guère plus de huit si on procédait à son alignement ".
         Non seulement, il est encombré de méandres, mais son lit n'est pas fixe : au gré des crues il se modifie : dans les archives communales du milieu du XVIII° siècle, j'ai trouvé au sujet du ruisseau des Espaces qui, venant de vers Lastours, longe dans sa partie couverte, les allées Paul Marty et le nouveau chemin piétonnier de l'Ecole : " le ruisseau des Espaces, ancien lit de l'Hers ". A cette époque, la mémoire populaire en avait gardé le souvenir.
         Autre fait : M. Armengaud, baziégeois, disparu depuis peu, prétendait qu'une partie des douves du château de Lastours était un des anciens méandres de l'Hers.
         Dans l'immense plaine de la gouttière, les agriculteurs peuvent reconnaître, selon la nature des sols, les emplacements des anciens passages de la rivière.
         Le chemin de las Puntos, selon M. Odol serait sur le tracé d'un ancien lit de l'Hers.
         Le peu de pente, à l'origine des méandres, faisait que le courant était très peu rapide (d'où le nom d'Hers mort). Mais à la moindre période pluvieuse, surtout si elle se prolongeait, on le voyait monter et déborder rapidement. Ce qui fait que même en période sèche, les bas-fonds de l'Hers restaient constamment marécageux.

Carte représentant les diocèses à l'Est de Toulouse et la vallée de l'Hers - 1651

Epoque Gallo-romaine
         Les romains vont être gênés par cette zone peu propice au passage de leurs armées et du commerce en toutes saisons :
         Vers les années 118 av J.C., les romains pour assurer les arrières de la Narbonnaise, envoient leurs légions à Toulouse où elles s'installent. Vers 55 av J.C., elles gagneront la Gascogne et la région bordelaise. C'est à cette période que fut créée la Voie d'Aquitaine.
         De Ad-Vicesimum (au pied de l'actuel Montgaillard) à Badéra (Baziège) la voie d'Aquitaine longeait la grande forêt au nord de la vallée dans le pied des collines (pas très loin de l'actuelle RN 113). A Badera, il lui fallait traverser la vallée de l'Hers pour rejoindre la rive gauche et accéder aux zones peuplées jusqu'à Vieille Toulouse, mais aussi pour contrôler les chemins gaulois venant du pied des Pyrénées et qui permettaient d'acheminer des marchandises précieuses comme le minerai de fer ou le fer mais aussi de l'or4.
         A Baziège, à l'endroit le plus resserré de la vallée, des lentilles de gré dans le lit de l'Hers auraient permis aux Romains de construire un pont5 . D'autre part la difficulté de traverser, par tous les temps, la plaine marécageuse aurait été tournée en construisant une chaussée surélevée entrecoupée régulièrement par des ponceaux qui permettaient la circulation des eaux : c'est la chaussée qu'on appelle encore aujourd'hui les " pountils " ou le chemin des Romains. Ce qu'il en reste a complètement été remanié au XVIII° siècle par ordre de Colbert.

Moyen-Age
         La vallée de l'Hers, par la suite, est mentionnée par le biais de la Forêt qui l'enserre pendant tout le Moyen Age. Au traité de Verdun, (août 843), la Francia occidentalis échoit à Charles le Chauve, petit-fils de Charlemagne. Le Midi n'accepte pas ce partage et veut rester fidèle à son ancien maître Pépin II, petit-fils lui-aussi de l'Empereur. Charles le Chauve doit soumettre Toulouse par la force plusieurs fois. En 849, la ville lui est livrée par le comte Frédélon, ancêtre de la dynastie des Comtes Raimon de Toulouse. C'est au cours d'une de ces présences que Charles le Chauve serait allé chasser dans la forêt de Baziège. On y aurait poursuivi, à cette époque, l'auroch, race de bœufs sauvages aujourd'hui disparus6.
         Une autre évocation de l'Hers, on la trouve dans la Canso, La Chanson de la croisade albigeoise. En 1219, une partie des troupes occitanes, ayant à leur tête le Comte de Foix, affronte sous Baziège un groupe de Français, commandés par les frères de Berzy.
" …les chevaliers se sont rangés en bataille; ceux de l'un et l'autre parti se sont tellement rapprochés qu'il n'y a entre eux qu'un petit fossé sans pont ni planche. Quand le Comte de Foix et ses vaillants barons le franchirent, les deux partis formèrent deux masses ".

         Jean Odol situe l'espace de cette bataille aux alentours des Boulbènes, seule zone hors marécage près de Baziège et séparée d'elle par l'Hers. Ce qui nous laisse penser que le fossé (" un petit fossatz ou un balat " ) évoqué par l'auteur de la Canso n'est autre que l'Hers, peu profond et sans beaucoup d'eau puisque les chevaliers ont pu le franchir sans planche ni pont, sans risque que leurs lourdes montures et leur non moins lourde charge ne s'embourbent. Ce qui permettrait aussi d'apporter une précision sur la saison : l'été ou l'automne qui sont les deux saisons où l'Hers est à son plus bas niveau.
         Les siècles suivants apportent leurs litanies de malheurs : l'Inquisition, les chevauchées du Prince Noir, les pillages incessants des routiers, la peste à l'état endémique dès 1349.
         Les coteaux de la vallée de l'Hers et sa forêt ont souvent servi de refuge aux populations persécutées.
         Des habitats troglodytes étaient même creusés dans le gré molassique. P. Fageot dans son ouvrage sur le folklore Lauragais (1884) les appelle des " traoucs " et en cite un certain nombre aujourd'hui disparus .

Premières tentatives d'aménagement
         Au XV° siècle, la population augmente et ses besoins aussi. On commence à défricher la Forêt de Saint-Rome et de Baziège. Deux grands espaces sont déboisés : l'un de 166 arpents du côté de Baziège et l'autre de 162 arpents du entre Villefranche (bastide créée par Alphonse de Poitiers vers 1250 (L'église date de 1271) et Villenouvelle, qui apparaît sous Louis XI. Ce sont " les labours du roi7 ". Les parties défrichées, le sont jusqu'au lit de l'Hers, les plus proches étant occupées par des prairies en raison de leur risque d'inondation. A Baziège, les fermes d'En Cabos et d'En Tière furent implantées sur ces parties prises sur la forêt et les marécages.
         Bien avant la construction du Canal Royal, les communautés riveraines de l'Hers se plaignent. Dès 1555, les Etats du Languedoc enregistrent des doléances des riverains de la rivière et de l'ensablement continuel de leurs propriétés. Des mémoires (rapports) sont fréquemment produits :
         L'un d'eux dit : " Par un abus qui s'est glissé dans les siècles passés, on a souffert que des particuliers aient bâti des moulins dans le lit propre de ce ruisseau et les propriétaires ou meuniers ont poussé si loin leur audace qu'ils ont entièrement fermé le cours d'eau… certains font même des réserves d'eau dans les champs voisins8 . "
         Dans un autre mémoire collectif adressé au roi il est dit : " L'Hers, à sec pendant huit mois de l'année, inonde la campagne pendant les quatre autres. "
         En bien des endroits, le dépôt limoneux avait tellement comblé le lit de la rivière que " le sol de ce dernier s'en trouvait de quatre pans plus élevé que la superficie des champs qui l'environnaient. "
         Le Parlement de Toulouse et la Table de Marbre9 , entre 1554 et 1713 prennent des arrêtés qui font injonctions aux riverains et aux propriétaires des moulins de faire des travaux pour éviter les débordements. Ces arrêtés restent lettre morte. L'Archevêque de Toulouse10 est lui-même mis à contribution, en 1714 :
" … s'il n'a pas la bonté de donner une attention particulière à cette affaire, les choses demeureront en l'état et les débordements continueront à priver la ville de Toulouse et une grande partie du diocèse des fourrages11 nécessaires à l'entretien des bestiaux "

         Les auteurs de cette demande ajoutent que jusque là " on s'était heurté au désagrément d'inquiéter plusieurs personnes de condition, dont il aurait fallu saisir les revenus. "
         Ces personnes de condition qui auraient été chargées de faire exécuter les arrêtés étaient aussi des riverains ou des propriétaires des moulins construits sur l'Hers12 .

         Enfin le roi, Louis XV13 , mis au courant de l'état déplorable dans lequel se trouvait la rivière de l'Hers et de l'inefficacité des mesures prises par le Parlement de Toulouse, disposa par un arrêt de son Conseil, le 10 décembre 1726 que toutes les difficultés relatives aux réparations de ce cours d'eau seraient réglées à l'avenir par l'Intendant de la Province (qui résidait à Montpellier). Il faut aussi parler de l'impact du Canal Royal qui emprunte la vallée de l'Hers. Riquet, pour se simplifier la tâche, avait fait déverser tous les ruisseaux de la rive gauche (Gardijol, Thésauque… ) dans le canal. Mais il n'avait pas prévu que lors des grosses pluies, ces ruisseaux ensableraient le canal, le feraient déborder et renforceraient les inondations de l'Hers. Quelques années seulement après la mort de Riquet14, l'avenir du canal était compromis et l'ont fit appel à Vauban qui fit creuser des aqueducs sous le canal pour le passage de ces torrents. Si le canal fut sauvé, la plaine de l'Hers continua à souffrir de crues à répétions et persistantes car le lit de ces ruisseaux recreusés pour passer sous le canal était bien souvent plus bas que celui de l'Hers qui par conséquent ne pouvait évacuer leurs eaux. Dès 1726, Bernage de Saint-Martin, intendant de la Province va prendre les choses en main. Il commença à mettre au pas les gens de condition " qui devaient se soumettre comme tout le monde aux lois et aux règlements, et ne plus se prévaloir de leur situation pour continuer à méconnaître et à fouler aux pieds les droits et les intérêts des riverains de l'Hers. "
         Il autorise la nomination par le diocèse de gardes " pour ouvrir les vannes et pertuis des moulins dans le temps des grosses pluies, en particulier pendant les mois de mars d'avril, de juin et d'autres si les crues l'exigeaient, faisant défense aux propriétaires, fermiers des moulins, aux meuniers et autres de les troubler dans l'exercice de leurs fonctions. "
         Il fait établir un état détaillé de tous les moulins. Cet état porte la date du 8 juin 1732. On y trouve la situation de chacun d'eux, le nom du propriétaire et le chiffre exact de ses revenus. A l'exception des deux derniers, tous les moulins étaient à deux meules.
         Les Etats de la Province décident le 9 octobre 1737 la suppression pure et simple des moulins à partir de Villefranche jusqu'à l'endroit que déterminerait l'Intendant et prévoient la somme nécessaire pour indemniser les propriétaires.          L'ingénieur Sénès chargé d'un rapport et le 7 juillet 1738, Bernage rend enfin l'ordonnance portant exécution de l'arrêt du Conseil de Province :
" Il y aurait inconvénient, disait-il à détruire tous les moulins, les communautés devant dans ce cas être hors d'état de faire moudre leurs grains. On doit en laisser subsister quelques-uns, et il est à propos de conserver les inférieurs, parce qu'ils sont moins nuisibles, observant néanmoins d'augmenter leur distance par la destruction des moulins qui sont entre deux, et, suivant cette proportion, on devra laisser subsister les moulins appelés Davizard (de Lasbordes), Launaguet, Bruguière et Castelnau, lesquels sont non seulement moins nuisibles, mais encore, plus utiles que les autres, parce que dans ces endroits il n'y a point de moulin à vent pour y suppléer, au lieu que dans la partie supérieure, depuis Villefranche jusqu'à Toulouse, il y en a en grand nombre et qu'on pourra d'ailleurs en construire sur le Canal. "

         Les propriétaires avaient trois mois pour démolir leurs moulins et seraient indemnisés dès que la démolition serait effectuée. Après d'âpres discussions entre experts et propriétaires15 les indemnités furent fixées et figurèrent aux comptes de l'Assiette (des Impôts) du diocèse.
         A Baziège, Desquerré, menaçait de faire démolir l'épanchoir de son moulin, ce qui entraînerait une augmentation du cours de la rivière d'environ 3000 pas, ruinerait plusieurs jardins et maisons et inonderait la prairie d'amont.
         En 1741, le moulin fut démoli, mais aussi le pont qui faisait communiquer les rues de Baziège avec le chemin d'Ayguesvives, ce qui mit en péril les marchés. L'assemblée communale fit observer aux autorités du diocèse que si le pont n'était pas reconstruit rapidement, l'archevêque et le curé de Baziège y perdraient aussi, ne pouvant plus assurer la perception de la dîme. L'argument fut entendu et le pont reconstruit16 .
D'après une carte de 1721, l'emplacement des moulins sur l'Hers et leur date de démolition.

         1726-1741, quinze ans, il avait fallu quinze ans pour régler le problème des moulins de l'Hers !
          Mais la suppression de ces moulins ne suffit pas et l'on dut se résoudre à des mesures plus radicales. L'Intendant de la province envoya Garipuy, ingénieur des ouvrages de la province, qui dressa en 1743 un projet de travaux d'élargissement et d'alignement général de l'Hers. En 1744, le Conseil du roi, approuvait le projet et statuait que les travaux seraient exécutés à la diligence du syndic du diocèse et payés par les communautés riveraines. Cela réglait par la même occasion les problèmes liés au re-creusement des ruisseaux liés au canal royal du Languedoc. Commencés en 1745, les travaux vont durer jusqu'en 175017 .
         Ils vont se continuer dans le lit inférieur aux abords de Toulouse : en 1748, l'Intendant de la province met en demeure les Capitouls de faire recreuser le lit de l'Hers à Périole et d'y construire un pont. Le 23 juillet 1755, a lieu la réception définitive de tous les travaux de l'Hers.
         De temps en temps des travaux complémentaires sont nécessaires. En 1764, sur ordonnance de l'Intendant, les capitouls font élargir et recreuser le lit de l'Hers de Lasbordes aux limites de la ville. D'autres travaux eurent lieu en 1766 et 1767.
         Des mesures conservatoires s'imposent aussi : des sanctions vont s'avérer nécessaires : des personnes compromettent la sécurité des champs et des récoltes en dégradant les francs-bords de la rivière, en y faisant des brèches par lesquelles au temps des crues les débordements pouvaient se produire. Par endroits, on cultivait même les berges de la rivière qui s'affaissaient et devenaient moins résistantes ; on y menait paître le bétail qui à force de piétinement dégradait et fragilisait les berges.
         Les crues ne cessant pas (1756, 57, 62 , 70,), les quelques moulins qu'on avait conservés dans le lit inférieur furent accusés d'entraver le courant et les communautés vont demander leur démolition : ceux de Launaguet et Bruguières furent démolis en 1771, celui de Castelnau en 1776.
         Chaque crue amène des travaux, des ouvrages à faire ou à compléter. En 1772, le lit de la rivière au niveau de Toulouse s'était envasé et un re-creusement est nécessaire. Le Conseil de la ville hésite devant la dépense (99.500 livres). La ville devait en supporter la moitié et assurer à l'avenir la moitié des frais d'entretien. L'autre partie étant assurée par l'Archevêché propriétaire des terres. En dépit des capitouls qui soutenaient " que seuls les riverains devaient supporter les frais occasionnés par de tels travaux ", le Conseil de ville réussit à convaincre l'archevêché avec une indemnité conséquente (40 000 livres) que la ville serait déchargée à perpétuité de toute obligation au sujet de partie de l'Hers située sur son territoire. "

Du XIX° siècle à nos jours.
         Si la Révolution a mis fin aux disputes sur la démolition des moulins, la rectification du lit de l'Hers jugée nécessaire et quasiment terminée, les inondations ont continué, certes moins fréquentes et durables étant donné que l'eau s'écoulait plus rapidement. Il y en eut d'importantes en 1793, 1827, 1834, 1835, 1854, 1856, 1875,
         Devant le manque d'entretien, la difficulté de coordonner tous les travaux, un syndicat des communes riveraines de l'Hers est crée en 1849 (Deuxième République). Ses ressources vont provenir en grande partie d'un impôt payé par les communes riveraines.
         Ce syndicat va prendre en charge l'endiguement des rives de l'Hers et les travaux vont se terminer sous le Second Empire.
         Le 12 août 1856, le Conseil Municipal de Baziège trouve que les travaux ne vont pas assez vite :
" impressionné péniblement des dégâts qu'a occasionné la dernière inondation [il] proteste de la manière la plus formelle et la plus énergique contre la façon dont sont employés les fonds de l'impôt créé pour la réparation de la rivière de l'Hers. Impôt qui se paie depuis 9 ans et qui jusqu'à présent n'a abouti à aucun résultat heureux. "
         Il propose que " chaque commune dans ses limites soit chargée des travaux à faire à ce cours d'eau en y employant les fonds de l'impôt ".
         Le 27 mars 1868, le Conseil municipal semble satisfait :
" Le lit de l'Hers par suite de l'intervention du syndicat de l'Hers a été descendu de 80 à 100 cm de profondeur, ce qui provoque un écoulement plus rapide des eaux. En effet depuis longtemps il n'a pas été donné de voir cette rivière malgré les pluies abondantes se gonfler en torrent, briser ses digues et porter ses ravages dans les campagnes. "

         En juin 1875, après d'importantes chutes de neige sur le Pyrénées durant l'hiver, d'abondantes pluies tièdes firent les firent fondre et un afflux considérable d'eau fit monter la Garonne qui inonda la plaine. A Toulouse, à St Cyprien les eaux atteignirent le niveau des dix mètres, jamais atteint. Tout le pays en aval de Toulouse fut inondé. Les eaux de l'Hers ne pouvant à leur tour se déverser dans le fleuve inondèrent toute la vallée inférieure de l'Hers. Il y eut des centaines de morts ou de disparus. Zola, dans une de ses nouvelles, l'inondation, publiée cette année-là, dans le Capitaine Burle, imagine, d'après des faits réels, l'histoire d'un grand père de St Jory qui voit tous les siens disparaître dans les eaux déchaînées.
         L'Hers dut aussi déborder du côté de chez nous. Antoine-Lucien Cazals, dans son ouvrage sur " Montesquiou sur Canal " cite cette année-là, aux dates du 24-25 juin comme année de grande inondation.

         Au XX° siècle, que nous venons de quitter, il y a eu, au moins, deux grandes inondations dont on a gardé la trace dans les mémoires :
1952 (article paru dans la Dépêche du midi le 5 février)
Dès la journée de Samedi 2 février, on pouvait constater que le niveau de la rivière atteignait presque le sommet des berges. Dans la soirée, aucune amélioration ne se manifestait et dimanche, aux premières heures de la matinée, la rivière sortait de son lit pour atteindre vers midi les premières maisons du village. L'Hers s'étendait sur plus d'un kilomètre de largeur et ses berges momentanées étaient d'une part les maisons de la ville et de l'autre le talus du Canal du Midi. Seuls, au milieu du fleuve, émergeaient des arbres dont on n'apercevait plus les troncs et des immeubles ( métairie appartenant à M. Mascar " Tournante ", etc...) amputées de 1,50m à leur base. Toutes les métairies bâties dans la plaine constituaient autant d'îlots et les flots emportaient tout ce qu'ils pouvaient arracher: là une planche, ici une cage à lapins avec occupants, plus loin de la paille voire même des animaux. A l'heure actuelle, il est difficile de faire un recensement exact car le sol détrempé a rendu toute approche difficile, mais déjà en ville, des dégâts sérieux ont été constatés. Le garage occupé par M. Berger se trouvait en plein dans le courant. Par leur violence, les eaux ont arraché le portail et les réserves de combustibles en bidons, huile, essence etc. ont été emportées à la dérive. Une bonne partie de l'outillage est inutilisable ou à réviser, moteurs électriques en particulier.
L'entreprise de menuiserie appartenant à M. Jean Masson a eu fort à souffrir: stock de bois disparu, outillage détruit ou inutilisable.
Dans la nuit de dimanche à lundi, les eaux se retiraient enfin. A noter que depuis dimanche matin la ville est privée d'électricité,
Il est difficile maintenant d'estimer les dégâts provoqués par la crue de l'Hers; sans aucun doute, ils seront importants. En plus de ceux qui ont atteint les habitations, dans notre commune, plus de 100 hectares de terrains emblavés ont été submergés. La récolte est sûrement perdue; de plus le système de drainage a été atteint. Là, les travaux sont d'importance. Il est indispensable que des mesures d'urgence soient prises afin que les paysans de notre région, déjà si durement atteints, s'aperçoivent qu'ils ne sont pas sans cesse des déshérités.

(D'après La Dépêche du Midi du 5 février 1952.)
En 1971, les 23 - 24 mars
         Les abondantes pluies tombées ces jours derniers, surtout lundi, ont considérablement gonflé les rivières et les cours d'eau.
         L'Hers, qui durant l'été n'est qu'un mince filet d'eau a pris des proportions énormes entre Baziège et Lasbordes, rompant des digues et submergeant des terres. D'ailleurs, dès lundi matin, son niveau ne cessait de monter de manière inquiétante puisqu'on enregistrait une courbe atteignant 45 cm à l'heure. Pendant la nuit, le mouvement devait se ralentir, mais hier, à dix heures, à Baziège l'eau n'en était pas moins à 5,48m alors que la cote d'alerte est à 4 mètres. Il faut d'ailleurs remonter à 1952 pour trouver une crue semblable. Les débordements de l'Hers ont atteint une grande partie de la plaine; des routes et des chemins ont été coupés.

(D'après la Dépêche du Midi du mardi 24 mars 1971.)
         On a dit à cette époque que l'Hers n'avait pas été entretenu : lit encombré par la végétation, digues non réparées.
         De plus quand l'eau sautait les digues, elle ne pouvait rejoindre le lit de la rivière lors de la décrue, ce qui fait que les zones inondées le restaient longtemps.
         En 1972, le syndicat de l'Hers a entrepris de grands travaux et un re-calibrage complet du lit de l'Hers avec un abaissement des digues.
Depuis ces travaux, lors des grandes pluies, l'Hers est monté mais n'a jamais débordé dans le lit moyen, par contre, il sort encore de son lit aux abords de Toulouse.
Conclusion.
         Si l'Hers demeure aujourd'hui une préoccupation et une interrogation pour beaucoup de riverains, il ne faut pas oublier sa longue histoire : il fut, en réalité, pendant longtemps précieux et redoutable : source d'eau, de sable pour les constructions, de bonne terre, de bois (l'aulne), de pacages mais aussi ravageur en quelques heures d'un pays qu'il avait contribué à fertiliser et à enrichir.
         Si les hommes n'ont pu le dompter entièrement, ils ont réussi à calmer son penchant naturel aux excès et souvent ils ont appris à leur dépens qu'une indifférence prolongée à son égard pouvait avoir pour eux de navrantes conséquences.
Notes :

1 - Nommé Hers Mort par opposition à l'Hers vif (ou grand Hers), rivière aux eaux fortes, qui prend sa source dans le Massif du St Barthélemy, dans les Pyrénées Ariégeoises et se jette dans l'Ariège en amont de Cintegabelle au niveau de l'ancienne abbaye de Boulbonne   Retour
2 - La gouttière est une dépression, un fossé limité au nord et au sud par des accidents de la molasse ; elle sépare deux blocs de collines dont celui du Sud (Montesquieu, Nailloux, Ayguesvives, Montgiscard) est plus levé que celui du Nord (région de Labastide Beauvoir) ; J . Odol  Retour
3 - qui allait de Montlaur à Avignonet  Retour
4 - Un autre chemin venant du nord, du pays des Rutènes arrivait à Baziège, ce qui faisait de Badéra un véritable nœud de communications.   Retour
5 - Le pont actuel " dit des Romains " serait construit sur les piles de l'ancien pont Romain (selon L. Dutil)
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6 - Il y aurait eu un traouc de l'Anglès sur la Cne de Villefranche - souvenir du passage du Prince Noir ?  Retour
7 - Depuis la mort d'Alphonse de Poitiers, frère de Saint-Louis, le comté de Toulouse appartenait à la couronne de France. Louis XI offrit le Comté du Lauragais à La famille de La Tour d'Auvergne en 1478. Par alliance, le comté passera dans la famille des Médicis : Catherine de Médicis, puis sa fille Marguerite de Valois (Margot), - première femme d'Henri IV- furent aussi comtesse du Lauragais.  Retour
8 - Le meunier du Moulin des Barthes à Montgiscard, (en face le Petit Clos) avait fait un réservoir de 120 arpents en inondant volontairement les prairies, formant " un lac prodigieux ".  Retour
9 - Juridiction chargée, sous l'Ancien régime, des Eaux et Forêts.  Retour
10 - De nombreuses terres de la vallée de l'Hers appartenaient à des congrégations religieuses comme le Chapitre de St Sernin.  Retour
11 - Fourrages produits dans les parties basses de la vallée de l'Hers : d'où un de ses rôles économiques.  Retour
12 - On s'en étonnera moins quand on saura que, parmi les intéressés, figuraient M. de Nupce, premier président au Parlement de Toulouse; M. de Fieubet, conseiller à la même Cour; M.M. Dadivisard et de Palaprat,- capitouls, et quelques autres personnages de qualité, très capables de contrebalancer, par leur influence personnelle, l'autorité des fonctionnaires royaux. F. de Gelis, " Villenouvelle au bon vieux temps " (p 162)  Retour
13 - Louis XV inaugure en 1726, la partie personnelle de son règne. Depuis sa majorité en 1723, il avait laissé le soin des affaires du royaume au duc de Bourbon qu'il disgracia cette année-là.  Retour
14 - Riquet 1604 -1680 - Construction du Canal 1667-1681  Retour
15 - A partir du jour où les moulins sont définitivement condamnés, nous assistons à une lutte homérique entre leurs possesseurs et les agents de l'autorité. Les experts des uns produisent de longs mémoires où les moulins sont représentés comme des usines superbes, pourvues des engins les plus perfectionnés et donnant à leurs propriétaires les plus beaux revenus, les contre-experts des autres répondent par des rapports non moins volumineux où l'on traite les mêmes constructions de vieilles bâtisses hors d'usage, occasionnant plus de pertes que de profits. On plaide, on juge, on fait appel, on casse, on confirme et on recasse les jugements. Toute la chicane est en oeuvre et toute la bazoche en mouvement.
Nous en aurons une idée par le moulin de Bigot; M. de Jossé des Cars, héritier de M. de Palaprat, prétend que ce moulin lui rapporte 1726 livres de revenu annuel et demande 34.520 livres d'indemnité. On lui en offre 6.7001 Après cent expertises, contre- expertises, débats et contestations, M. Garipuy, ingénieur, intervient à titre de tiers-arbitre, désigné par M. de Bernage, intendant du Languedoc. Il démontre que le moulin de Bigot est mal construit, en mauvais état, qu'il ne peut moudre que pendant huit mois de l'année et que, quoique noble et exempt de la taille, il ne rapporte à son propriétaire pas plus de 890 livres de revenu. Finalement il fixe à 7.800 livres l'indemnité qui sera allouée à M. de Jossé. Encore lui sera- t-il retenu 860 livres d'amende pour n'avoir pas construit l' " épanchoir " prescrit! (François de Gélis -Villenouvelle au bon vieux temps, p 165, 1906)  Retour
16 - Où ce moulin était-il situé ? Sûrement à la sortie de Baziège sur la route d'Ayguesvives. L'eau de L'Hers était déviée par un canal après un épanchoir (puisque si on le démolit, le lit de l'Hers est allongé de 3000 pas. (2250m). Ces dernières années, en posant les conduites du tout-à-l'égout, du côté de chez M. Masson, avenue de l'Hers, fut mis à jour à quelques mètres de profondeur un mur derrière lequel sortait un puissant courant d'eau. Ne serait-ce pas là l'ancien épanchoir du moulin de DESQUERRE ?   Retour
17 - On peut s'étonner de cette lenteur, mais tout se faisait à la main : le 23 août 1750, l'Assemblée communale de Baziège se plaint : " que les entrepreneurs abandonnent le chantier de l'Hers pour aller travailler ailleurs et au surplus sans bien faire l'ouvrage. En outre, les ouvriers sont payés 15 sols par toise, ils ne travaillent qu'à proportion. "  Retour